Le génome des grands requins blancs révèle le secret de leurs superpouvoirs
Des scientifiques ont séquencé le génome du grand requin blanc et l'ont comparé à celui d'autres vertébrés y compris l'humain. Ils ont identifié plusieurs particularités qui pourraient expliquer notamment l'exceptionnelle longévité et la résistance au cancer des squales. Les requins font partie des créatures les plus répandues mais aussi des plus anciennes de la planète. On estime que les premiers squales sont apparus il y a plus de 400 millions d'années et ont, au fil des âges, évolué pour donner les quelque 470 espèces répertoriées aujourd'hui telles que le grand requin blanc. Dans les océans, ce prédateur apparait comme une véritable force de la nature. En plus de ces mensurations impressionnantes, le squale présente une longévité record, une capacité de guérison exceptionnelle ainsi qu'une résistance étonnante au cancer. Autant de particularités qui ont contribué à la durabilité des requins mais d'où viennent-elles ? Une équipe scientifique internationale a réussi à apporter un début de réponse en réalisant un séquençage complet du génome du grand requin blanc. En le comparant avec celui d'autres vertébrés, elle a mis en évidence des caractéristiques génétiques qui pourraient expliquer les "superpouvoirs" du squale.
Séquencer le génome du requin blanc n'était pas une mince affaire. Ce dernier compte 41 paires de chromosomes et 4,3 milliards de paires de bases, soit 1,5 fois plus que le génome humain qui compte 23 paires de chromosomes et 3 milliards de paires de bases. Mais cette grande taille n'est pas la seule particularité mise en évidence par les chercheurs au cours de leur étude. En décodant l'ADN du squale, ils ont également constaté une adaptation moléculaire au niveau de plusieurs gènes impliqués dans la stabilité génétique. En effet, une grande partie du génome du requin, comme le nôtre, est constituée de séquences d'ADN répétées. Les spécialistes distinguent plusieurs types de séquences qui peuvent être plus ou moins longues et plus ou moins répétitives. Parmi elles figurent ce qu'ils appellent de Longs éléments nucléaires intercalés ou LINE. "Ces LINES réalisent des copies d'eux-mêmes et puis se réinsèrent à différents endroits du génome. Au cours de ce processus, ils provoquent des ruptures de la double hélice dans l'ADN qui a alors besoin d'être réparé", explique Michael Stanhope, biologiste à l'Université Cornell et coauteur de l'étude. Chez les grands requins blancs, les chercheurs ont observé un nombre record de LINE, environ 30%, l'un des plus grands taux rencontrés chez un vertébré. Le problème est que si ces séquences contribuent à fournir de la diversité génétique durant la reproduction des cellules, elles sont aussi source d'une grande instabilité génétique. Avec des ruptures plus fréquentes, l'ADN doit davantage être réparé.
Or, le processus de réparation n'étant pas parfait, le génome est exposé à un risque plus grand de mutations génétiques et donc de cancer. Mais les grands requins blanc eux, semblent avoir trouvé la parade. Les chercheurs ont en effet observé des changements au niveau de plusieurs gènes jouant un rôle dans la stabilité génétique. Des gènes impliqués notamment dans la réparation de l'ADN ou la réponse aux altérations de l'ADN. En clair, cela signifie que ces gènes auraient, chez les requins, connu une adaptation spécifique pour réduire l'instabilité génétique et le risque de mutations chez ces derniers. Ces squales sont réputés pour connaitre un taux extrêmement bas de cancer comparé à d'autres animaux. Si les données scientifiques pour confirmer cette particularité avec certitude, ces découvertes génétiques pourraient en partie expliquer cette résistance potentielle au cancer. "Si vous voulez prévenir le cancer, vous devez maintenir la stabilité de votre génome", souligne Michael Stanhope. Grâce à son génome, les scientifiques ont pu éclairer une autre faculté du grand requin blanc : ses capacités de guérison. Comme pour les gènes associés à la stabilité génétique, ils ont identifié des modifications très précises au niveau des gènes liés à la guérison des blessures, suggérant une adaptation similaire. Cette stabilité génétique et ce pouvoir exceptionnel de guérison pourraient en partie expliquer comment le grand requin blanc a pu atteindre de telles mensurations et une telle longévité. Ils pourraient également expliquer comment les squales ont pu prospérer pendant 500 millions d'années sur Terre, soit plus longtemps que presque tous les vertébrés.
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